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Le Roman de Fauvel

« Un roi sans culture est comme un âne couronné »

Jean de Salisbury (1115-1180)

 

Composé à Paris durant le premier quart du XIVe siècle, le Roman de Fauvel

est une œuvre satirique virulente écrite sur le modèle du Roman de Renart

et s’attaquant aux pouvoirs politiques et religieux. Constitué de deux livres,

le récit met en scène un cheval allégorique, Fauvel, représentant les vices à

l’œuvre dans la société et dont les initiales forment le nom (Flatterie, Avarice,

Vilenie, Variété, Envie et Lâcheté). L’étymologie « faus » et « vel » (fausseté

voilée) donnée dans le poème indique l’aspect trompeur et hypocrite de sa

nature. Quant à la couleur fauve, péjorative au Moyen Age, elle fait référence

à son caractère infernal.

L’ auteur, Gervais du Bus, est un membre de la chancellerie royale proche du

pouvoir. Dans le premier livre (1310) il passe en revue toutes les catégories

sociales qui  flattent  l’animal, donnant ainsi une vision pessimiste de

déchéance morale généralisée.

Le second livre publié en 1314, met en scène l’empereur Fauvel qui trône en

son palais puis son mariage avec Vaine Gloire. De leur union naîtront

d’innombrables petits fauveaus qui se répandront à travers le monde.

Pas moins de 14 manuscrits du roman subsistent aujourd’hui , témoignant

de sa grande popularité. Bien que la « mule fauve » soit déjà évoquée dans

des récits antérieurs (notamment « Renart le Nouvel » de Jacquemart Gielée), certaines expressions doivent à l’œuvre de Gervais d’être passées à l’époque dans le langage courant comme « Etriller Fauvel ». Un  « estrille Fauveau » désigne encore au XVIe siècle un arriviste peu scrupuleux et en Angleterre l’expression to curry favel (étriller Fauvel) est devenue to curry favor (s’attirer les faveurs de quelqu’un).

L’intérêt de ce roman pour l’histoire de la musique tient au fait qu’il existe une version développée du texte élaborée par Raoul Chaillou du Pestain, magistrat lui aussi au service de la cour de France à Paris, qui ajoute de nouveaux épisodes au récit ainsi qu’un très grand nombre d’interpolations musicales (pas moins de 167 pièces monodiques et polyphoniques). Près de 80 miniatures ornent les pages du célèbre manuscrit 146 de la Bibliothèque Nationale de Paris, le seul qui contienne cette version élargie.

La musique constitue à elle seule une véritable anthologie stylistique de la fin du XIIe au début du XIVe siècle, car si certaines pièces sont des compositions originales destinées au roman, d’autres sont des réemplois de mélodies antérieures (conduits et motets de l’Ecole de Notre Dame, hymnes, antiennes etc.) provenant d’un très grand nombre de sources. D’autres enfin sont attribuées à Philippe de Vitry (qui exerça lui aussi diverses charges à la cour de France) et sont caractéristiques de la nouvelle façon d’écrire la musique, l’art nouveau ou Ars Nova ( du nom de deux traités datant de 1320 environ : l’Ars nove musice de Jehan de Murs et l’Ars nova de Philippe de Vitry précisément).

 

Jehan de Lescurel

En dehors de la version interpolée du Roman de Fauvel, le manuscrit 146 de la Bibliothèque Nationale de Paris contient également l’intégralité des œuvres de Jehan de Lescurel.

Clerc escolier de Notre Dame de Paris, il semble avoir été l’un de ces fils de bourgeois pendus en 1304 « au commun gibet des larrons » pour assassinat de femmes.

A l’exception de la pièce à trois voix A vous, douce débonaire, son œuvre, incomplète, les folios s’arrêtent à la lettre G, se compose exclusivement de monodies profanes adoptant les formes du rondeau, virelai et ballade qui seront utilisées encore pendant plus de 200 ans.

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